Nouvelle - Illusion
Illusion.
Transperçant le brouillard, ces larmes vous happent...
La forme transparente avançait comme seule et pourtant elle était entourée de gens qui passaient à côté sans la voir. Le jeune homme avançait la tête haute, le corps mince, il n'était pas très séduisant, mais il s'en fichait, il avançait malgré tout. De toute manière, personne ne faisait attention à lui. Il croisait de temps en temps des visages connus mais même eux l'ignoraient. Le voile qui recouvrait le jeune homme semblait s'épaissir mais les passants ne voyaient rien ou alors qu'une illusion étrange qui leur semblait percevoir mais élancés, ils ne prenaient pas le temps de détailler cette vision passagère certainement due à la fatigue. Rares étaient, ceux qui se retournaient mais ils percevaient juste une ombre fantomatique avancée.
Parfois il s'arrêtait en un lieu public, il se posait toujours en un endroit discret où on ne pouvait pas trop le repérer pourtant il savait qu'au milieu de la grand place, on ne l'aurait pas beaucoup plus détaillé mais il préférait les coins calmes. Assis, il entrait dans sa bulle: lisait, réfléchissait, regardait autour de lui la vie courir, marcher, rigoler, parler, nourrir les canards, jeter des cailloux à la surface de l'eau, se disputer, pleurer, relacer ses chaussures, jouer, gifler, s'embrasser, se réconcilier, ... tout ça n'était pas lui, du moins n'était plus lui. Mais les sorties étaient devenues rares, l'inquiétude et la peur avaient pris le pas sur le reste. Désormais, il préférait sortir uniquement de jour et juste pour des promenades prenant peu de temps. Il regrettait énormément le temps où il se permettait les sorties nocturnes pour se promener ou bien aller courir (quoiqu'il le fasse encore mais moins souvent), ces moments où les odeurs caractéristiques de la nuit s'éveillent et vous transpostent dans des pensées lointaines et parfois magiques: rien de plus sensationnel que la nuit pour marcher ou courir.
Chez lui, c'était plutôt bien rangé. Au contraire de ses pensées, qui elles, formaient un joli fouillis dans sa tête. Une maison sympathique mais bien vide. Les visites dans la maison étaient rares, au plus souvent, il était tout le temps seul vivant encore comme une ombre. Le jeune homme continuait tout de même à vivre et réfléchir, travailler. Il aimait philosopher, discuter, débattre, raconter, il avait temps de choses à dire, à défendre mais personne pour l'écouter. Il lisait beaucoup et de tout, regardait films, animes, dessins animées. Parfois il se lançait dans des parties de go en solitaire sur son goban où il essayait de développer son jeu.
Puis il allumait son ordinateur, l'illusion, qu'il était dans sa vie, mourrait. Il discutait avec des gens divers, tous gentils mais certains lui étant plus chers que d'autres. Il postait dans divers lieux, il parlait de ces passions et de lui aussi parfois, mais il aimait les aider aussi quand ils avaient besoin de lui car il voulait aider, se sentir utile, et puis c'était le juste prix en les aidant pour les remercier de le faire vivre, de le rendre vivant, il jouait aussi des parties de go de temps en temps et parfois même participait à un tournoi. L'ordinateur éteint, l'illusion reprenait sa place et recommençait les mêmes activités. Dormant rarement, le sommeil gagnant, il s'affaiblissait de jour en jour. Il mangeait presque à tout les moments de la journée car il était très gourmand, sauf quand il déprimait, là, il mangeait moins, parfois il lui arrivait même de se priver. Il aimait à se préparer de bons petits plats et surtout de bons desserts pour le repas du dîner, son petit péché mignon.
Son passé était désolation, humiliation, un dur passé. Petite Soeur, seule présente pour lui, aucun lien familial ne les unissait pourtant, est morte trop jeune, elle est la seule à connaître son enfance et elle a emporté le secret dans sa tombe. Lui pourrait en parler mais il faudrait qu'il trouve nouveau confident aussi sûr que Petite Soeur, mais les dernières années écoulées ont démontré qu'un nouveau confident est dur à trouver. Le jeune homme s'est construit malgré tout et c'est ce pourquoi il continue d'avancer fièrement même si parfois la tête se baisse de temps en temps car les coups ne cessent de pleuvoir, au moins la tête remonte sans cesse, infatigable jusque lors. Le sourire peignant son visage tout le temps, on dirait un ange aux traits grossiers qui se déplaçaient dans la foule qui ne se rendait pas compte de sa présence. Mince, il se faufilait, invisible, on ne sentait pas sa présence. L'illusion avait pourtant un coeur battant toujours espérant trouver des mains tendues, n'osant parfois les prendre, ne souhaitant pas déranger, ou imposer sa présence. Mais les mains, qui se tendaient, appartenaient à des ami(e)s se trouvant loin de lui. Ses meilleurs ami(e)s. Merci. Ils lui rendent vie, le jeune homme a mal réagi récemment car il se sentait perdu après une récente déconvenue, il ne voulait plus croire en l'amour qu'ils lui portaient car de par son passé et de par cette récente mésaventure, il pensait être entouré de mensonges. Il a compris que c'était une erreur de sa part, il s'en veut d'avoir pu douter d'eux. Eux, ses seul(e)s ami(e)s
Merci, illusion: transperçant le brouillard, ces larmes vous happent... Le bonheur n'est point encore trouvé mais il est quelque part devant lui et c'est pour cela qu'il continue à braver le vent la tête haute et souriante. Même si les larmes coulent comme des poignards chaque fois qu'il se retrouve seul.
Fin.
Ce texte est inédit, je ne l'ai posté nulle part ailleurs qu'ici pour le moment. Différent de mes autres nouvelles, le texte reste toujours tout de même dans mon registre préféré, le drame. J'espère que ces mots seront compris par ceux à qui je l'adresse.